Les approches innovantes

Changement de perspectives

Partout dans le monde, la pandémie de COVID-19 a frappé de plein fouet nos sociétés. Au-delà des risques sanitaires conséquents, les citoyens ont été confrontés à des confinements, à des couvre-feux et autres restrictions de la vie quotidienne. Pour certaines communautés néanmoins, les répercussions sont d’autant plus fortes que des tensions sociales et économiques existent déjà : le lavage des mains régulier n’est pas si évident lorsque les ressources en eau sont limitées, tandis que la diffusion des messages de santé publique constitue un véritable défi lorsque la confiance envers le gouvernement est au plus bas. Pour ce qui est des opérations en matière de prévention et de lutte contre l’extrémisme violent, la pandémie pose son lot de défis bien particuliers, étant donné que tant la maladie que les mesures adoptées pour prévenir sa propagation peuvent renforcer les moteurs d’extrémisme violent, par la réduction de la cohésion sociale, la restriction de l’accès aux opportunités économiques et l’incidence sur le bien-être mental. 

Les projets en matière de prévention et de lutte contre l’extrémisme violent financés par l’UE sont conçus de sorte à garantir souplesse et flexibilité pour réagir aux circonstances changeantes.

Si la crise liée à la COVID est sans précédent à bien des égards, elle constitue aussi un exemple de la manière dont des événements imprévus peuvent faire dévier le meilleur des programmes. Et, dans les régions du monde luttant contre la menace de l’extrémisme violent, se préparer à l’inattendu est monnaie courante étant donné la constante évolution des défis en jeu. C’est pourquoi les projets en matière de prévention et de lutte contre l’extrémisme violent financés par l’UE sont conçus de sorte à garantir souplesse et flexibilité pour réagir aux circonstances changeantes.

Pour voir une telle souplesse à l’œuvre pendant le bouleversement sans précédent provoqué par la pandémie, inutile de chercher plus loin que les Jeunes Ambassadeurs au Burkina Faso. Parmi les initiatives rondement menées par cette organisation, citons le projet « Mobile Journalisme » (MOJO) destiné à former les jeunes en production vidéo, dans le but de donner la parole aux personnes issues de tous les milieux tout en partageant des messages de paix et de cohésion sociale. Auparavant, les jeunes réalisateurs avaient produit des documentaires sur l’extrémisme violent dans la région, cherchant à sensibiliser la population jeune et à favoriser la discussion. Néanmoins, lorsque la COVID-19 a touché la région, ils n’ont pas attendu pour trouver des solutions pour mettre leurs compétences à contribution dans un effort commun pour combattre le virus.

À noter que la pandémie a des répercussions notables sur la vie quotidienne au Burkina Faso, et les ONG locales ont dû s’adapter, étant donné que les confinements ont mis un terme aux programmes de formation et aux activités scolaires. Pourtant, leurs liens avec les communautés locales les positionnent idéalement pour assurer des campagnes de sensibilisation. En collaboration avec les autorités sanitaires régionales, les Jeunes Ambassadeurs ont identifié les messages clés à propos de la COVID et la manière dont les citoyens peuvent se protéger du virus. Ensuite, les réalisateurs de MOJO se sont mis au travail : en collaborant avec des intervenants communautaires, ils ont créé des vidéos pour diffuser le message et montrer les bonnes pratiques à adopter, notamment en dévoilant comment une distributrice de bières du village a appris à appliquer les mesures de protection dans le cadre de son activité.

Outre la diffusion de précieuses informations, les vidéos ont également permis de donner la parole aux locaux sur cette question clé, de sorte à les aider à faire partie de la solution, comme l’explique le réalisateur de MOJO Yoanli Yemeoido : « Les gens nous contactent, car seuls, ils ne parviennent pas à se faire entendre. Ils n’ont pas l’occasion de s’exprimer et ils estiment que c’est important de le faire en ces temps difficiles ». Les vidéos ont été largement diffusées dans la communauté via Facebook et WhatsApp. « Les gens disent « voilà d’où nous venons, c’est notre vie quotidienne » », souligne Whali Jean Silvanu, coordinateur de programme des Jeunes Ambassadeurs. « Lorsque les histoires proviennent de notre communauté et que le public sent qu’il fait partie du mouvement, les vidéos ont plus de poids. »

« Lorsque les histoires proviennent de notre communauté et que le public sent qu’il fait partie du mouvement, les vidéos ont plus de poids. »

Yoanli Yemeoido, réalisateur de MOJO

Si l’on se penche sur des bénéficiaires du GCERF au Kosovo, citons par exemple une femme qui a obtenu un financement pour son activité de textile lancée à la suite d’un programme de formation en petites entreprises. Lorsque la pandémie a frappé la région, elle a changé de modèle d’affaires pour se lancer dans la fabrication de masques buccaux, en créant un tutoriel en ligne sur la manière de coudre un masque et en vendant ou en offrant gratuitement les masques qu’elle produit aux professionnels de la santé. Il convient également de mentionner un autre projet qui promeut la cohésion sociale dans les écoles du Kosovo et qui soutient la réintégration des combattants terroristes étrangers de retour dans leur pays d’origine et de leur famille, au travers de programmes éducatifs pour les enfants qui reviennent de Syrie et d’Irak. L’arrivée de la COVID a entraîné la fermeture des écoles, ce qui a nui à la stabilité et à la continuité si essentielles aux yeux des jeunes victimes de traumatismes. En redirigeant les financements alloués, l’ONG a néanmoins été en mesure d’adapter le programme et de fournir des tablettes aux étudiants afin qu’ils puissent suivre les cours depuis leur domicile. Une étape de plus accomplie grâce à la flexibilité du financement, qui fait une grande différence dans la vie des enfants vulnérables en cette période difficile.

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